Qui n’a jamais « liké » une vidéo de chaton faisant du trampoline ou « retweeté » un article sans même l’avoir lu (juste parce que le titre avait l’air intéressant) ? Allez, on se dénonce. Pas la peine d’en avoir honte, nous le faisons tous. Aussi rationnels que nous soyons, il faut croire qu’il y a quelque chose de plus fort que nous qui dicte et conditionne nos actions sur les réseaux sociaux. Un je-ne-sais-quoi qui fait que nous nous connectons compulsivement, tous les jours (voire toutes les heures), et que nous réagissons à coups de clics à certains contenus.
Mais de quoi s’agit-il au juste ? D’hypnose numérique ? D’un charme vaudou digne d’un (mauvais) film de série B ? Rien de tout cela. Cet étrange phénomène d’addiction trouve son origine dans notre cerveau. Plusieurs mécanismes psychologiques élémentaires permettent d’expliquer pourquoi nous passons notre temps à exprimer nos opinions et nos émotions sur les réseaux. De très sérieuses études scientifiques le confirment. Et quand la science explique le buzz, ça devient franchement passionnant !
Parce que l’on veut créer des liens
Publier sur les réseaux sociaux est souvent décrit comme le summum du nombrilisme. Pourtant, la première raison pour laquelle nous aimons et partageons du contenu sur ces plateformes est pour être utile aux autres. C’est ce que révèle une étude conduite par le New York Times Customer Insight Group : 84 % des gens appuient sur le bouton « Partage » (ou « Retweet ») pour soutenir une cause et 78 % le font pour maintenir un contact avec leur communauté. Ces motivations « altruistes » gagnent haut la main, puisque seulement 49 % des sondés déclarent utiliser les réseaux pour passer le temps. C’est ce qui explique, par exemple, l’immense popularité en 2014 de l’Ice Bucket Challenge – vous vous souvenez, ce défi consistant à se renverser un seau d’eau glacé sur la tête pour médiatiser la lutte contre la sclérose latérale amyotrophique (SLA).
À y regarder de plus près, ce mécanisme n’est pas si étonnant. Selon des psychologues de la prestigieuse université UCLA (États-Unis), l’une des premières régions qui s’active dans notre cerveau lorsque nous découvrons du contenu digne d’intérêt (« Tiens, une robe qui change de couleurs sur la même photo ! ») est le carrefour temporo-pariétal*. Or, il s’agit de la zone du cortex qui nous pousse à échanger avec nos semblables. En d’autres termes, lorsque nous voyons une nouvelle information, notre réaction immédiate (et inconsciente) est de nous demander si elle intéressera les autres. Ce qui est à l’origine du partage.
Parce que l’on souhaite affirmer son identité
Lorsque nous aimons ou partageons du contenu sur les réseaux sociaux, nous faisons en réalité beaucoup plus que l’approuver. Nous nous identifions à travers lui. Plus précisément, nous définissons notre « moi idéal », un concept introduit par les psychologues Hazel Markus et Paula Nurius en 1986. Lorsque je partage des images de plats sans sucre, sans gluten, sans lactose (et sans nourriture ?) sur Instagram, c’est peut-être parce que je fais en ce moment un régime draconien. Mais il est en fait plus probable que j’expose ces photos pour montrer que j’aimerais être une personne à l’alimentation saine. Autrement dit, les réseaux sociaux m’aident non pas à montrer qui je suis, mais qui je rêve d’être.
Pourtant, n’imaginez pas que vous pouvez tromper les réseaux aussi facilement. Même si vous prétendez être une personne que vous n’êtes pas (ou pas tout à fait), il est possible de connaître très précisément vos caractéristiques réelles grâce aux traces que vous laissez sur la Toile. Selon une étude récente, vos likes trahissent des informations aussi personnelles que la couleur de votre peau (avec une précision de 95 % !), votre orientation sexuelle (88 %) ou votre âge (75 %). Big Brother n’est jamais loin !
Parce que c’est une forme d’acquiescement
44 % des utilisateurs cliquent au moins une fois par jour sur le bouton « J’aime » de Facebook. Certains le font même de manière un peu automatique, au point que l’on se demande s’ils lisent les publications avant de les liker. Mais au juste, qu’est-ce qui se cache derrière cette action répétitive, que l’on retrouve sur tous les réseaux sociaux ? Il s’agit d’un signe simple et rapide d’acquiescement. Les internautes l’utilisent pour montrer qu’ils s’identifient au contenu publié, parce qu’ils le trouvent intéressant (61 % sondés dans le cadre d’une étude Ipsos), drôle (43 %) ou unique (26 %).
Un petit exemple maison pour illustrer notre propos. Ce tweet Made in Wixrebondissait sur le #hashtag à la mode ce jour-là, « #jesuispasvieuxmais ». L’occasion de publier une photo de ces deux objets que les moins de 20 ans ne connaissent pas toujours, mais qui éveillent forcément des souvenirs chez les Tweetos ayant passé cet âge fatidique. Parce qu’ils étaient d’accord avec le message, ces derniers se le sont massivement approprié en le partageant. Résultat : plus de 400 retweets et presque autant de likes. Moralité ? Les K7 ont encore de beaux jours devant elles !
Parce que cela procure du plaisir
Pourquoi est-ce que nous laissons des commentaires sur les réseaux sociaux ? Parce que nous avons quelque chose à dire. Banal, mais vrai. Lorsqu’on répond à une publication ou sur un forum, c’est que l’on estime que son opinion peut intéresser les autres. Au-delà, et c’est là que ça devient croustillant, les commentaires sont une intense source de… plaisir. Pour la personne qui écrit, bien sûr – Ah, que c’est bon de pouvoir dire tout le bien que l’on pense de Nabilla abrité par l’anonymat ! – mais aussi pour la personne qui reçoit le message. Une enquête menée par la chercheuse Moira Burke montre ainsi qu’il est beaucoup plus gratifiant de recevoir un commentaire qu’un simple like en réponse à une publication. Comme quoi, il n’y a pas que l’intention qui compte !
Plus généralement, plusieurs recherches scientifiques ont montré que naviguer et agir sur Facebook stimulent les zones qui font du bien dans le cerveau. Comment l’ont-ils découvert ? Tout simplement en observant les internautes. Ces derniers, lorsqu’ils se connectent sur le réseau de Mark Zuckerberg, présentent des réactions physiologiques traditionnellement associées au plaisir et à l’amour, comme les pupilles qui se dilatent. C’est votre conjoint(e) qui va tirer la tronche !
Parce que l’on a peur de passer à côté de l’information
Dernier mécanisme à l’origine de notre passion pour les réseaux sociaux : les nouvelles. La multiplication des canaux d’information a créé une nouvelle forme de dépendance (que certains considèrent comme une pathologie) : le FOMO, pour Fear Of Missing Out, ou « peur de passer à côté », en bon français. On reconnait les personnes atteintes de ce syndrome au fait qu’elles ne peuvent jamais se séparer plus de 20 secondes de leur téléphone portable, et qu’elles manquent de défaillir dès que la batterie passe sous le seuil des 10 %. Pourquoi ? Parce qu’elles ont besoin de tout savoir, tout le temps. Du coup, elles suivent (« followent ») un maximum de comptes, pour optimiser leurs chances de recevoir les dernières nouvelles. Comme aurait dit le philosophe : je follow, donc je suis !
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* En plus d’être impliqué dans l’échange, le carrefour temporo-pariétal peut provoquer d’étonnantes illusions perceptives. Pour la petite histoire insolite, des chercheurs se sont rendu compte qu’en stimulant électriquement cette zone du cerveau, ils pouvaient provoquer des expériences extracorporelles chez les patients (sensation de « sortir de son corps »). Évidemment, dès qu’on a vu ça, on n’a pas pu s’empêcher de partager !